04 décembre 2024
Réchauffement climatique: le seuil de +1,5°C a t-il été dépassé ?
Selon l’Institut européen Copernicus, août 2024 a été le mois d’août le plus chaud jamais enregistré (avec août 2023). Au niveau mondial, la température de l’air moyenne s’élevait en effet en ce mois à 16,82°C, soit 1,51°C au-dessus des niveaux préindustriels (période de 1850 à 1900). Entre septembre 2023 et août 2024, la température a été de 1,64°C supérieure à la période préindustrielle. C’est également un record pour une période de 12 mois. Ces chiffres sont alarmants mais est-ce que le seuil fixé dans l’accord de Paris de 2015 a été dépassé ? Explications sur le calcul de la moyenne du réchauffement.
Une question de calcul …
La double limite de +1,5°C et de +2°C avait été invoquée pour la première fois lors de la COP15 à Copenhague en 2009. Elle a ensuite été incluse formellement dans la COP21 (accord de Paris 2015). La convention préconisait de « contenir l’élévation moyenne de la planète nettement en-dessous de 2°C (…) en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5°C » d’ici la fin du siècle.
L’accord de Paris ne définit pas précisément comment on calcule un réchauffement d’1,5°C ou de +2°C. Il convient de rappeler que cette limite de température vise à stabiliser les températures à long terme. Pour mesurer l’évolution, il faut analyser la moyenne sur plusieurs décennies et sa tendance, en gommant les effets de la variabilité naturelle. Dans leur sixième rapport d’évaluation de 2021, les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) préconisaient une période d’observation de vingt ans. Des chercheurs de l’Institut météorologique britannique ont proposé de construire un indicateur combinant les dix dernières années d’observations de la température mondiale et des projections qui modélisent les années à venir. Une autre méthode pourrait consister à extrapoler la tendance des dernières années pour les années à venir. Ces approches permettront de mieux anticiper le franchissement du seuil et d’éviter de créer la confusion au moment même où il deviendra encore plus urgent d’agir pour éviter les pires effets du changement climatique.
… et d’interprétation des textes
Si la formulation de l’accord de Paris paraît ambigüe, c’était probablement intentionnel afin de faciliter l’obtention d’un accord pendant les négociations. En terme d’atténuation, l’objectif est bien de poursuivre +1,5°C tout en restant bien en-dessous de 2°C et d’atteindre des émissions nettes nulles dans la seconde moitié du siècle. Cet objectif est légalement contraignant mais pose des questions d’interprétation notamment en ce qui concerne les risques de dépassement. Les pays signataires de l’accord de Paris les plus vulnérables comme les petits états insulaires insistent plutôt sur la limite de 1,5°C et d’autres, moins exposés, sur celle de +2°C.
Des limites pas seulement physiques mais aussi politiques
Il est important de souligner que ces limites sont aussi politiques et pas seulement physiques. Elles servent à déterminer les politiques de baisse des émissions des états et entreprises car il existe une relation proportionnelle entre le niveau de réchauffement global et le cumul des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Les limites de +1,5°C et de +2°C ne sont pas des températures au-delà desquelles le monde va s’effondrer. Mais les risques sont beaucoup plus élevés dans un monde réchauffé de 2°C que dans un monde à +1,5°C. Cela est une certitude.
La trajectoire compte aussi
Plus que l’année du franchissement, déterminer la pente du réchauffement sera au moins aussi crucial pour prévoir jusqu’où les températures vont monter avant de se stabiliser. Vu le niveau des activités humaines, le dépassement du +1,5°C semble difficile à éviter. Le GIEC estime probable que ce seuil sera dépassé avant 2040. Cette trajectoire dépend de nos émissions de gaz à effet de serre dans les années à venir. Si nous réussissons à les réduire de 42% d’ici 2030 et d’atteindre la neutralité carbone en 2050, nous aurons réussi à reprendre le contrôle de notre avenir !
Sources : Organisation Météorologique Mondiale, Le Monde, GIEC